GOe – Gastronomy Open Ecosystem est en train de s’élever dans le quartier de Gros, à Donostia/Saint-Sébastien. Pensé comme la « deuxième maison » du Basque Culinary Center (BCC), ce projet veut réunir sous un même toit recherche scientifique, formation avancée, entrepreneuriat foodtech et activités ouvertes au public. Plus qu’un bâtiment, c’est un hub urbain destiné à connecter talents, entreprises, chercheurs, étudiants et habitants autour d’une même idée : faire de Saint-Sébastien une référence mondiale de l’innovation gastronomique, en continuité avec sa tradition culinaire. Voici une synthèse complète, en français naturel, des origines, des objectifs, du design, des usages et des controverses liées à GOe—ainsi que de son inscription dans les tendances gastronomiques globales.

Pourquoi GOe ? Une vision née du Basque Culinary Center
Depuis son ouverture en 2011, le Basque Culinary Center s’est imposé comme un acteur international clé de l’éducation et de la recherche en gastronomie. Fort de ce succès, le BCC a voulu franchir une étape : ouvrir la gastronomie sur la ville et accélérer les liens avec la science, la technologie et l’entrepreneuriat. C’est l’ambition de GOe : un écosystème ouvert, complémentaire du campus universitaire de Miramón, qui se concentre davantage sur l’innovation, la R&D et le transfert vers la société.
L’idée s’est concrétisée via un concours international d’architecture. Le projet lauréat, baptisé « Olatuen Bidea / Le chemin des vagues », a été conçu par le studio Bjarke Ingels Group (BIG), figure de proue de l’architecture contemporaine. Le choix de BIG traduit l’ambition de faire de GOe un symbole urbain, lisible par les habitants comme par les visiteurs : un signal que Saint-Sébastien mise sur la gastronomie du futur, sans renoncer à son identité.
Un programme hybride : science, formation, startups et citoyenneté
GOe n’est ni une simple école, ni un simple centre de congrès. C’est un programme hybride articulé autour de six axes complémentaires :
- Recherche et développement
Des cuisines-labos et des espaces scientifiques pour expérimenter sur la santé et la nutrition, la durabilité (réduction du gaspillage, économie circulaire, nouvelles protéines), la sensorialité (textures, arômes, expérience), la technologie alimentaire (procédés, conservation, traçabilité) et la numérisation (IA, données, modélisation culinaire). L’objectif : transformer des défis planétaires en solutions concrètes et exportables. - Formation avancée et formation continue
Des masters spécialisés et des programmes courts axés sur la gastronomie de demain : innovation culinaire, food design, gestion durable, technologie alimentaire… Cette offre vient compléter le diplôme universitaire de Miramón, en ciblant des profils déjà formés ou en reconversion. - Entrepreneuriat et foodtech
Des espaces d’incubation et d’accélération pour startups, avec mentorat d’experts, passerelles vers l’investissement et coworking. GOe se positionne comme un accélérateur économique, où les idées naissent en cuisine et se transforment en produits, services ou entreprises. - Services aux entreprises et innovation ouverte
Conseils, pilotes, co-création de produits, formation en entreprise : GOe veut connecter la grande cuisine et l’industrie, du producteur local à l’acteur agroalimentaire international, afin de tester rapidement, itérer et déployer. - Événements et diffusion
Un auditorium et des espaces polyvalents pour congrès, démonstrations, salons, conférences, ateliers pro et rencontres grand public. De quoi renforcer le calendrier d’événements culinaires de Saint-Sébastien et attirer des talents internationaux tout au long de l’année. - Ouverture à la ville
Une rez-de-chaussée accessible, des ateliers pour tous (jeunes, familles, seniors), des expositions et un espace de restauration possible : l’idée est de partager la culture alimentaire et d’encourager des habitudes saines, sans cloisonner le savoir entre experts.
Un geste architectural pensé pour Gros : « le chemin des vagues »
Implanté près de la plage de Zurriola et du mont Ulia, le bâtiment signe une rencontre du paysage et de l’urbain. La proposition de BIG se distingue par une toiture verte en pente, praticable, qui prolonge la colline et évoque une vague. Cette couverture devient un belvédère public : on y marche, on s’y arrête, on regarde la ville et l’océan. Plutôt qu’un volume fermé, GOe se présente comme un relief habitable, traversé par les piétons.
Ce geste répond à deux enjeux :
- Intégrer un équipement majeur dans un tissu résidentiel sans créer de rupture, en multipliant les parcours et les espaces de pause accessibles.
- Renforcer le vert en ville : la toiture végétalisée améliore l’isolation, gère les eaux pluviales et compense visuellement l’emprise au sol.
Côté façades, la recherche de lumière naturelle et de sobriété énergétique guide l’expression architecturale. L’échelle du bâtiment est maîtrisée pour dialoguer avec le quartier : l’icône n’est pas la hauteur, mais la topographie. Résultat : un nouveau lieu de promenade et d’observation, à deux pas de la plage, qui fait le lien entre la ville, la mer et la montagne—et, symboliquement, entre tradition et innovation.
Les bénéfices attendus pour Saint-Sébastien
GOe s’inscrit dans une stratégie qui vise des retombées économiques, sociales, culturelles et d’image.
- Emploi et activité : l’exploitation d’un hub de cette nature mobilise des profils qualifiés (recherche, cuisine, tech, gestion, production d’événements) et génère des emplois indirects (services, tourisme, communication, fournisseurs locaux).
- Positionnement international : Donostia est déjà un haut lieu de la gastronomie. Avec GOe, la ville renforce son rôle sur le versant innovation et connaissance, ce qui attire des étudiants, des chercheurs, des entrepreneurs et des événements à portée mondiale.
- Effet d’entraînement local : coopérations avec universités, centres technologiques, producteurs, artisans, restaurateurs. Le hub sert de plateforme de projets avec retombées concrètes : nouveaux produits, pratiques durables, montée en compétence du tissu local.
- Culture alimentaire pour tous : ateliers et activités accessibles qui élèvent la littératie alimentaire (santé, saisonnalité, anti-gaspillage), renforcent le lien à la terre et au territoire et valorisent le patrimoine culinaire basque.
Au plan touristique, GOe n’est pas un « sightseeing » au sens strict, mais il enrichit l’expérience : démos, expositions, conférences et, surtout, un toit-parc qui deviendra naturellement un point de vue apprécié. À l’heure où le tourisme gastronomique progresse, un équipement ouvert, contemporain et proche de la plage constitue un atout différenciant.
Les controverses : sol public, végétation, échelle… et réponses apportées
Comme tout projet urbain d’ampleur, GOe a suscité des réserves et des oppositions locales, notamment autour de trois sujets :
- L’usage d’une parcelle publique
Des voix citoyennes ont contesté la pertinence de dédier ce site à un équipement associé au BCC, plaidant pour d’autres affectations possibles (santé, logement, etc.). Les institutions ont rappelé que le terrain est classé en équipement public au plan d’urbanisme et que le projet reste un service d’intérêt général, centré sur l’éducation, la recherche et la diffusion. - La perte perçue d’espaces verts
Une partie du débat s’est cristallisée sur l’empreinte écologique. Les critiques redoutaient la disparition d’arbres et d’un « dernier poumon vert » du secteur. En réponse, le projet met en avant la toiture végétalisée accessible, la création d’une place publique en pied d’édifice, des replantations et une stratégie de compensation végétale, pour que le bilan paysager et d’usage soit positif à terme. - L’intégration dans le quartier
Inquiétudes relatives à la circulation, à la fréquentation, à l’ombre portée le long du chemin de Saint-Jacques qui passe à proximité. Le dessin de BIG privilégie la perméabilité piétonne, des gabarits contenus, et une animation en rez-de-chaussée pour partager—et non confisquer—l’espace. Des ajustements de fonctionnement et de programmation pourront accompagner la mise en service.
Sur le plan juridique, des recours ont été déposés contre les actes urbanistiques permettant la construction. La validation du projet par la justice a constitué un tournant, clarifiant le cadre et offrant de la visibilité à l’exécution. Au-delà du droit, l’enjeu est désormais d’apaiser et d’inclure : multiplier les usages publics, garantir une ouverture réelle au quotidien et mesurer l’impact (mobilités, bruit, fréquentation) pour corriger si nécessaire.
Un point souvent rappelé par les défenseurs du projet : Saint-Sébastien a déjà vécu des controverses urbaines virulentes (on pense au Kursaal), parfois suivies d’une appropriation citoyenne réussie une fois l’équipement livré. L’ambition est que GOe suive la même trajectoire : un débat légitime pendant la conception, puis un usage partagé et, à terme, une fierté locale.
Un projet en phase avec les grandes tendances culinaires
GOe s’aligne sur plusieurs mouvements de fond qui transforment la gastronomie :
- Santé et nutrition : alimentation personnalisée, prévention, pédagogie culinaire.
- Durabilité : circuits courts, valorisation des coproduits, sobriété énergétique, nouvelles protéines, re-lecture des recettes traditionnelles sous l’angle écologique.
- Technologies et données : IA pour la création et l’optimisation, impression 3D alimentaire, traçabilité et transparence, outils numériques pour la formation et la gestion.
- Expérience et culture : design de l’expérience alimentaire, croisement arts-sciences, médiation culturelle pour tous les publics.
- Réseaux internationaux : interconnexion avec d’autres hubs (par exemple au Japon) pour échanger talents, méthodes et projets, accélérer la diffusion des bonnes pratiques et tester à l’échelle globale.
L’idée est claire : faire de Donostia un nœud mondial de savoir-faire culinaire appliqué, de la recherche fondamentale jusqu’au produit fini, en conservant la sensible identité basque—paysage, mer, producteurs, sociétés gastronomiques—comme ressource et inspiration.
Ce que GOe peut changer concrètement
- Pour les professionnels : lieux pour prototyper plus vite (produits, services, formats de restauration), accès à des ressources scientifiques, mentorat et réseaux.
- Pour les étudiants et les chercheurs : passerelles entre formation, laboratoire et entreprise, mobilité internationale, projets concrets avec impact.
- Pour les habitants : ateliers réguliers (cuisine, santé, durabilité), activités culturelles, toit-promenade et rez-de-chaussée vivant.
- Pour la ville : visibilité accrue, événements attractifs hors saison, stimulation de la création d’entreprises et maillage plus dense entre acteurs publics et privés.
Cap sur l’ouverture
Avec l’avancement du chantier, GOe se profile comme un repère contemporain à Gros. Sa force ne résidera pas seulement dans son image, mais dans sa capacité à relier : relier l’excellence de la cuisine basque aux enjeux de santé et d’écologie, relier le monde académique et l’économie réelle, relier les visiteurs et les habitants autour d’un imaginaire commun—bien manger, comprendre ce que l’on mange, innover sans renier ses racines.
Si l’on devait retenir une seule idée, ce serait celle-ci : GOe transforme la gastronomie en bien commun urbain. Un lieu où l’on apprend, où l’on invente, où l’on transmet—et où l’on se promène—afin que Donostia continue d’être une capitale mondiale du goût, de la créativité et du savoir.
Repères clés (en bref)
- Qu’est-ce que GOe ? Un écosystème gastronomique urbain : recherche, formation, startups, événements et activités pour le public.
- Par qui ? Porté par le Basque Culinary Center, avec un projet architectural signé Bjarke Ingels Group (BIG).
- Où ? Quartier de Gros, près de la Zurriola et du mont Ulia, à Donostia/Saint-Sébastien.
- Pour qui ? Professionnels, étudiants, chercheurs, entrepreneurs… et habitants, avec une ouverture en rez-de-chaussée et une toiture-parc accessible.
- Pourquoi maintenant ? Pour accélérer l’innovation culinaire au croisement santé-durabilité-technologie, et renforcer le rayonnement international de la ville.
- Les débats ? Usage du sol public, végétation, intégration urbaine. Réponses : toiture végétalisée, espaces publics, programmation ouverte et cadre légal validé.
- Le pari : faire de GOe un bien commun qui bénéficie à l’écosystème local et positionne Donostia au cœur des tendances mondiales de la gastronomie.